Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/303

Cette page a été validée par deux contributeurs.

aurait planté ses dents dans une proie. Elle, abandonnait son corps, son âme, à cet enlèvement qui était impérieux et sans résistance possible, tout en restant doux comme une longue caresse enveloppante : il l’emportait dans l’obscurité vers le beau lit blanc à la mode des villes qui devait être leur lit nuptial…

Autour d’eux, pour leur premier coucher de mariage, le même invisible orchestre jouait toujours.

Houhou !… houhou !… Le vent tantôt donnait en plein son bruit caverneux avec un tremblement de rage ; tantôt répétait sa menace plus bas à l’oreille, comme par un raffinement de malice, avec des petits sons filés, en prenant la voix flûtée d’une chouette.

Et la grande tombe des marins était tout près, mouvante, dévorante, battant les falaises de ses mêmes coups sourds. Une nuit ou l’autre, il faudrait être pris là dedans, s’y débattre, au milieu de la frénésie des choses noires et glacées : — ils le savaient…

Qu’importe ! Pour le moment, ils étaient à terre, à l’abri de toute cette fureur inutile et retournée