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sans plus prendre garde à eux ni à la pluie commencée, marchant lentement sous l’averse comme quelqu’un absorbé dans une rêverie, il traversa la place, dans la direction de Ploubazlanec…

Alors elle lui pardonna tout, et un sentiment de tendresse sans espoir prit la place de l’amer dépit qui lui était d’abord monté au cœur.

Elle s’assit, la tête dans ses mains. Que faire à présent ?

Oh ! s’il avait pu l’écouter rien qu’un moment ; plutôt, s’il pouvait venir là, seul avec elle dans cette chambre où on se parlerait en paix, tout s’expliquerait peut-être encore.

Elle l’aimait assez pour oser le lui avouer en face. Elle lui dirait : « Vous m’avez cherchée quand je ne vous demandais rien ; à présent je suis à vous de toute mon âme si vous me voulez ; voyez, je ne redoute pas de devenir la femme d’un pêcheur, et cependant, parmi les garçons de Paimpol, je n’aurais qu’à choisir si j’en désirais un pour mari ; mais je vous aime vous, parce que, malgré tout, je vous crois meilleur que les autres jeunes hommes ; je suis un peu riche, je sais que je suis jolie ; bien que j’aie habité dans les villes, je vous jure que je