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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

sais quoi encore, — dans notre polit logis de natte, amarré cette fois sur la vase empestée, sur les horribles détritus, et enveloppé comme toujours de tous côtés par la grande froidure noire.

Au dessert, à l’heure des cigarettes dans le sarcophage, Renaud, à qui j’ai donné la parole, me conte que son escadron est campé au bord d’un cimetière chinois de Tien-Tsin et que les soldats d’une autre nation européenne (je préfère ne pas dire laquelle), campés dans le voisinage, passent leur temps à fouiller les tombes pour prendre l’argent qu’on a coutume d’enterrer avec les cadavres.

— Moi, dit-il, moi, mon colonel (pour lui, je suis mon colonel ; il ignore l’appellation maritime de commandant qui chez nous est d’usage jusqu’aux cinq galons d’or), moi, je ne trouve pas que c’est bien : ça a beau être des Chinois, il faut laisser les morts tranquilles. Et puis, ça me dégoûte, ils coupent leur viande de ration sur les planches de cercueil ! Et moi, je leur