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VERS PÉKIN.

Les maisons, aux portes et aux fenêtres brisées, laissent voir leur intérieur lamentable, où tout est en lambeaux, cassé, déchiré comme à plaisir. Et dans l’épaisse poussière que soulèvent le vent de Nord et le piétinement de nos hommes, flotte une intolérable odeur de cadavre.

Pendant deux mois, les rages de destruction, les frénésies de meurtre se sont acharnées sur cette malheureuse « Ville de la Pureté céleste », envahie par les troupes de huit ou dix nations diverses. Elle a subi les premiers chocs de toutes les haines héréditaires. Les Boxers d’abord y ont passé. Les Japonais y sont venus, héroïques petits soldats dont je ne voudrais pas médire, mais qui détruisent et tuent comme autrefois les armées barbares. Encore moins voudrais-je médire de nos amis les Russes ; mais ils ont envoyé ici des cosaques voisins de la Tartarie, des Sibériens à demi Mongols, tous gens admirables au feu mais entendant encore les batailles à la façon asiatique. Il y est venu de cruels cavaliers de l’Inde, délégués par la Grande-