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VERS PÉKIN.

Nous ne recevrons plus rien maintenant jusqu’à Tong-Tchéou (Ville de la Pureté céleste), où nous arriverons après-demain soir, si rien de fâcheux ne nous entrave. Ensuite, le halage de la jonque recommence, lent et monotone entre les tristes berges dévastées.

Le paysage autour de nous demeure immuablement pareil. Des deux bords, se succèdent à perte de vue des champs de « sorghos », — qui sont des espèces de millets géants, beaucoup plus hauts que nos maïs ; la guerre n’a pas permis qu’ils fussent moissonnés en leur saison, et la gelée les a roussis sur place. Le petit chemin de halage, étroit sur la terre grisâtre, s’en va toujours de même, au ras de l’eau fétide et froide, au pied des éternels sorghos desséchés, qui se dressent le long du fleuve en rideau sans fin.

Parfois un fantôme de village apparaît, à l’horizon plat : ruines et cadavres si l’on s’approche.

J’ai sur ma jonque un fauteuil de mandarin, pour trôner au soleil splendide, quand la bise