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VERS PÉKIN.

et tant de factionnaires présentant les armes, qu’on se fatiguait le bras à rendre les continuels saluts militaires reçus au passage, dans cette Babel inouïe.

Au bout de la ville détruite, près des hauts remparts, devant ce palais des vice-rois où nous nous rendions pour voir les déesses, des Chinois à la cangue étaient alignés le long du mur, sous des écriteaux indiquant leurs méfaits. Et deux piquets gardaient les portes, baïonnette au fusil, l’un d’Américains, l’autre de Japonais, à côté des vieux monstres en pierre au rictus horrible qui, suivant la mode chinoise, veillaient accroupis de chaque côté du seuil.

Rien de bien somptueux, dans ce palais de décrépitude et de poussière, que nous avons distraitement traversé ; rien de grand non plus, mais de la vraie Chine, de la très vieille Chine, grimaçante et hostile ; des monstres à profusion, en marbre, en faïence brisée, en bois vermoulu, tombant de vétusté dans les cours, ou menaçant au bord des toits ; des formes affreuses, partout esquissées sous la cendre et l’effacement