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VERS PÉKIN.

J’emporte un ordre de service, afin que l’on me donne ma ration de campagne aux gîtes d’étape en passant ; sans cela je risquerais de mourir de faim dans ce pays dévasté. J’ai pris le moins possible de bagage, rien qu’une cantine légère. Et un seul compagnon de route, un fidèle serviteur amené de France.

À la gare, où j’arrive comme le soleil se lève, retrouvé tous les zouaves d’hier, sac au dos. Pas de billets à prendre pour ce chemin de fer-là : tout ce qui est militaire y monte par droit de conquête. En compagnie de soldats cosaques et de soldats japonais, dans des voitures aux carreaux brisés où le vent fait rage, nos mille zouaves parviennent à se loger. Je trouve place avec leurs officiers, — et bientôt, au milieu du pays funèbre, nous évoquons ensemble des souvenirs de cette Afrique où ils étaient, des nostalgies de Tunis et d’Alger la Blanche…

Deux heures et demie de route dans la morne plaine. D’abord, ce n’est que de la terre grise comme à Takou ; ensuite, cela devient des