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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

C’est le colonel Marchand, et nous voici cheminant ensemble, sur la blancheur du Pont de Marbre. Un grand suaire de nuit et de silence est retombé sur toutes choses dans cette « Ville impériale » que nous avions remplie de musiques et de lumières, pour une soirée.

— Eh bien, me demande-t-il, comment était-ce ? Quelle impression en avez-vous ?

Et je lui réponds, ce que je pense en effet, c’est que c’était magnifiquement étrange, dans un cadre comme il n’en existe pas.

Cependant il est plutôt mélancolique, cette nuit, mon ami Marchand, et nous ne causons guère, nous entendant à demi-mot.

Mélancolie des fins de fête, qui peu à peu nous enveloppe, en même temps que l’obscurité revenue… Brusque évanouissement, dans le passé, d’une chose — futile, c’est vrai, — mais qui nous avait surmenés pendant quelques jours et distraits des préoccupations de la vie : il y a de cela d’abord…

Mais il y a aussi un autre sentiment, que nous éprouvons tous deux à cette heure, et