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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

absolue de ce même palais. Pauvre déesse ! On a improvisé ce soir un parterre d’iris naturels à ses pieds, et le fond dévasté de son autel a été garni d’un satin bleu aux cassures magnifiques, sur lequel sa personne se détache idéalement blanche, tandis que resplendit davantage sa robe d’or ourlée de petites pierres étincelantes.

On a eu beau faire cependant, on a eu beau éclairer ce sanctuaire, le remplir de lanternes en forme de fleurs et d’oiseaux, c’est une trop bizarre salle de bal ; il y reste des obscurités dans les coins, en haut surtout, vers les ors de la voûte. Et cette déesse qui préside, trop mystérieusement pâle, devient gênante, avec son sourire qui semble prendre en pitié ces puérilités et ces sauteries occidentales, avec la persistance de ses yeux baissés comme pour ne pas voir. Ce sentiment de gêne sans doute n’est pas chez moi seul, car la jeune femme qui menait le cotillon, prise de je ne sais quelle fantaisie soudaine, se sauve dehors, emportant l’accessoire de la figure commencée, — un tambour de basque, — entraînant à sa suite