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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

niches des vieux palais, des pagodes désolées, aux rebords des toits d’émail. L’obscurité et le silence coutumiers sont revenus peu à peu sur le lac et dans les lointains du bois impérial, parmi les arbres et les ruines. Les princes chinois se sont éclipsés discrètement, suivis de leurs soyeux cortèges, et emportés très vite dans leurs palanquins, loin d’ici, vers leurs demeures, à travers la ville pleine d’ombre.

Et maintenant c’est l’heure du cotillon, — après un bal forcément très court, un bal qui semblait une gageure contre l’impossible, car on avait réuni à peine dix danseuses pour près de cinq cents danseurs, et encore en y comprenant une gentille petite fille d’une douzaine d’années, une institutrice, tout ce que Pékin renfermait d’Européennes. Cela se passe dans la belle pagode dorée, convertie pour ce soir en salle de bal ; cela se danse au milieu de trop d’espace vide, devant les yeux toujours baissés de cette grande déesse d’albâtre, en robe d’or, qui, l’automne dernier, était ma compagne, avec certain chat blanc et jaune, dans la solitude