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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

simples parasols fichés en terre ; et ce sont les rôtisseurs de chiens, les bouilleurs de thé, les gens qui servent des boissons horribles ou des viandes effroyables, — dans de toujours délicieuses porcelaines, éclatantes de peinturlures ; ce sont les charlatans, les acupunctaristes, les guignols, les musiciens, les conteurs et les conteuses d’histoires. La foule, au milieu de tout cela, évolue à grand’peine, divisée en une infinité de courants divers, par tant de petites boutiques ou de petits théâtres, comme se diviseraient les eaux d’un fleuve au milieu d’îlots, et c’est un remous de têtes humaines, incessant et tourmenté, noirci de crasse et de poussière. Des vociférations montent de toutes parts, rauques ou mordantes, d’un timbre inconnu à nos oreilles, accompagnées de violons qui grincent sur des peaux de serpents, de bruits de gongs et de bruits de sonnettes. Les caravanes cependant, les énormes chameaux de Mongolie qui tout l’hiver encombraient les rues de leurs défilés sans fin, ont disparu vers les solitudes du Nord, avec leurs conducteurs au visage plat,