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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

sur les collines ou dans les vallées, laissent entre eux des espaces libres où ne croissent point de broussailles ; sous la colonnade de leurs troncs énormes, rien que de courtes graminées, de très petites fleurs exquises, et des lichens, des mousses.

Cette poussière, qui obscurcissait le ciel des plaines, ne monte sans doute jamais jusqu’à cette région choisie, car le vert magnifique des arbres n’en est nulle part terni. Et, dans cette solitude superbe que les hommes d’ici ont faite aux Mânes de leurs maîtres, quand le chemin nous fait passer par quelque clairière, ou sur quelque hauteur, les lointains qui se découvrent sont d’une limpidité absolue ; une lumière paradisiaque tombe alors sur nous, d’un profond ciel discrètement bleu, rayé par des bandes de petits nuages d’un gris rose de tourterelle ; dans ces moments-là, on aperçoit aussi, au loin, de somptueuses toitures, d’un émail jaune d’or, qui s’élèvent parmi les ramures si sombres, comme des palais de belles-au-bois-dormant…