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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

droite, mon « confrère » de l’Académie de Chine me dit des choses de l’autre monde. Il est vieux et entièrement desséché par l’abus de la fumée mortelle ; sa petite figure réduite à rien disparaît sous le cône de son chapeau et sous les deux ronds de ses grosses lunettes bleues.

— Est-il vrai, me demande-t-il, que l’empire du Milieu occupe le dessus de la boule terrestre, et que l’Europe s’accroche péniblement penchée sur le côté ?

Il paraît qu’il possède au bout de son pinceau plus de quarante mille caractères d’écriture et qu’il est capable, sur n’importe quel sujet, d’improviser des poésies suaves. De temps à autre, je vois avec terreur son petit bras de squelette sortir de ses belles manches pagodes et s’allonger vers les plats ; c’est pour y cueillir, avec sa propre fourchette à deux dents, quelque bouchée de choix qu’il me destine, — et cela m’oblige à de continuels et difficiles escamotages sous la table pour ne point manger ces choses.

Après les mets saugrenus et légers, parais-