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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

entrée de caverne ; de chaque côté, cinq ou six petites cages de bois sont accrochées, chacune emprisonnant une espèce de bête noire qui ne bouge pas au milieu d’un essaim de mouches, dont on voit la queue passer à travers les barreaux, pendre au dehors comme une chose morte. Qu’est-ce que ça peut être, pour se tenir ainsi roulé en boule et avoir la queue si longue ? Des singes ?… Ah ! horreur ! ce sont des têtes coupées ! Chacune de ces gentilles cages contient une tête humaine, qui commence à noircir au soleil, et dont on a déroulé à dessein les grands cheveux nattés.

Nous nous engouffrons dans la porte profonde, accueillis par le rictus des inévitables vieux monstres de granit, qui, à droite et à gauche, dressent leurs grosses têtes aux yeux louches. Pour me voir passer, des gens immobiles sont plaqués contre les parois de ce tunnel, à tout touche, grimpés les uns sur les autres : des nudités jaunes, des haillons de coton bleu, de vilaines figures. La poussière emplit et obscurcit ce passage voûté, où nous