Page:Loti - Les Derniers Jours de Pékin, 1901.djvu/330

Cette page a été validée par deux contributeurs.
315
RETOUR À NING-HAÏ.

soldats chinois sont clouées en étoiles, réunies en trophées avec des sabres, des poignards, et, sur la nappe blanche de l’autel que des potiches décorent, les flambeaux pour les cierges sont faits d’obus et de baïonnettes ; — choses naïves et charmantes, que les soldats savent arranger quand ils sont en exil.

La messe alors commence, très militaire, avec des piquets en armes, avec des sonneries de clairon qui font tomber à genoux les zouaves ; messe dite par l’aumônier de l’escadre, dans ses ornements de deuil ; messe de mort, pour les deux qui dorment, devant la porte, au vent glacé, sur les fourgons ornés de tardives fleurs. Et, dans la cour, les cuivres un peu assourdis entonnent lentement le « Prélude » de Bach, qui monte comme une prière, dominant ce mélange de patrie et de terre lointaine, de funérailles et de matinée grise…

Ensuite c’est le départ pour un enclos chinois tout proche, aux solides murs de terre battue, dont nous avons fait ici notre cimetière. On attelle des mules aux deux fourgons lourds,