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DANS LA VILLE IMPÉRIALE.

tours, vient d’être occupée militairement par une compagnie de notre infanterie de marine.

Ils n’ont point là d’autre gîte que les pagodes, nos soldats, et point d’autre lit de camp que les tables sacrées ; alors, pour pouvoir se faire un peu de place, pour pouvoir s’étendre, la nuit, sur ces belles tables rouges, ils ont doucement mis à la porte la peuplade des petits dieux secondaires qui les encombraient depuis quelques siècles, laissant seulement sur leurs trônes les grandes idoles solennelles. Donc, les voici dehors par centaines, par milliers, alignés comme des jouets sur les terrasses blanches, les pauvres petits dieux encore étincelants, sur qui tombent à présent le soleil et la poussière. Et, dans l’intérieur des temples, autour des grandes idoles que l’on a respectées, avec quels aspects de rudesse les fusils de nos hommes s’étalent, et leurs couvertures grises, et leurs hardes suspendues ! Et quelle lourde senteur de tanière ils ont déjà apportée, nos braves soldats, dans ces sanctuaires fermés, sous ces