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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

des valises, des sacs de voyage sont posés çà et là sur les meubles. L’évêque part demain pour l’Europe, qu’il n’a pas vue depuis douze ans. Il s’en va à Rome, auprès du Pape, et puis en France, chercher de l’argent pour ses missions en détresse. Sa grande œuvre de quarante années est anéantie ; quinze mille de ses chrétiens, massacrés ; ses églises, ses chapelles, ses hôpitaux, ses écoles, tout est détruit, rasé jusqu’au sol, et on a violé ses cimetières. Cependant, il veut tout recommencer encore, il ne désespère de rien.

Et quand il vient me reconduire à travers son jardin déjà obscur, j’admire la belle énergie avec laquelle il me dit, montrant sa cathédrale trouée d’obus, qui est la seule restée debout et qui se profile tristement sur le ciel de nuit avec sa croix brisée :

— Toutes les églises qu’ils m’ont jetées par terre, je les reconstruirai plus grandes et plus hautes ! Et je veux que chaque manœuvre de haine et de violence contre nous amène au contraire un pas en avant du christianisme