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DANS LA VILLE IMPÉRIALE.

Je suis charmé, chaque fois que je remonte dans ce palais, de retrouver le silence sonore de ma haute esplanade qu’entoure le faîte crénelé des remparts ; esplanade artificielle, d’où l’on domine de partout des paysages artificiels, mais immenses et séculaires, — et surtout interdits, interdits depuis qu’ils existent, et jamais vus jusqu’à ces jours par des yeux d’Européens.

Tout est tellement chinois ici qu’on y est pour ainsi dire au cœur même du pays jaune, dans une Chine quintessenciée et exclusive. Ces jardins suspendus étaient un lieu de choix pour les rêveries ultra-chinoises d’une intransigeante Impératrice, qui rêva peut-être de refermer, comme dans les vieux temps, son pays au reste du monde, et qui voit aujourd’hui crouler à ses pieds son empire, vermoulu de toutes parts autant que ses myriades de temples et ses myriades de dieux en bois doré…

L’heure magique, ici, est celle où l’énorme boule rouge qu’est le soleil chinois des soirs d’automne éclaire avant de mourir les toits de