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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

Le Chinois qui est venu me recevoir au seuil de la rue, en belle robe de soie prune, me fait asseoir et m’offre du thé ; c’est l’interprète de céans ; il parle français d’une façon correcte, même élégante : on est allé, me dit-il, m’annoncer à Son Altesse.

Sur un signe d’un autre Chinois, il m’emmène bientôt dans une seconde cour, et là m’apparaît, à la porte d’une salle de réception, un grand vieillard qui s’avance à ma rencontre. De droite et de gauche il s’appuie sur les épaules de serviteurs en robe de soie qu’il dépasse de toute la tête. Il est colossal, les pommettes saillantes sous de petits yeux, de tout petits yeux vifs et scrutateurs ; l’exagération du type mongol, avec une certaine beauté quand même et l’air grand seigneur, bien que sa robe fourrée, de nuance indécise, laisse voir les taches et l’usure. (On m’en avait prévenu d’ailleurs : Son Altesse, en ces jours d’abomination, croit devoir affecter d’être pauvre.)

La grande salle décrépite où il me reçoit est, comme la première, encombrée de malles et de