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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

Et puis il me reparle encore de l’enseigne Henry :

— La seule fois, dit-il, pendant tout le siège, la seule fois que nous ayons pleuré, c’est à l’instant de sa mort. Il était resté debout longtemps, avec ses deux blessures mortelles, commandant toujours, rectifiant le tir de ses hommes. À la fin du combat, il est descendu lentement de la brèche, et il est venu s’affaisser entre les bras de deux de nos prêtres ; alors nous pleurions tous et, avec nous, tous ses matelots qui s’étaient approchés et qui l’entouraient. — C’est qu’aussi il était charmant, simple, bon, doux avec les plus petits… Être un soldat pareil, et se faire aimer comme un enfant, n’est-ce pas, il n’y a rien de plus beau ?

Et il ajoute, après un silence :

— Il avait la foi, celui-là ! Chaque matin, il venait prier ou communier au milieu de nous, disant avec un sourire :

« Il faut se tenir prêt. »

Il est nuit noire quand je sors de chez l’évêque, auquel je ne pensais faire qu’une courte