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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

tition obsédante des deux autres, — sauf pourtant l’idole du centre qui, au lieu d’être assise et de taille humaine, surgit debout, géante, imprévue et presque effroyable. Les plafonds d’or, coupés pour la laisser passer, lui arrivent à mi-jambe, et elle monte toute droite sous une espèce de clocher doré, qui la tient par trop étroitement emboîtée. Pour voir son visage, il faut s’approcher tout contre les autels, et lever la tête au milieu des brûle-parfums et des rigides fleurs : on dirait alors une momie de Titan érigée dans sa gaine, et son regard baissé, au premier abord, cause quelque crainte. Mais, en la fixant, on subit d’elle un maléfice plutôt charmeur ; on se sent hypnotisé et retenu là par son sourire, qui tombe d’en haut si détaché et si tranquille, sur tout son entourage de splendeur expirante, d’or et de poussière, — de froid, de crépuscule, de ruines et de silence…