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DANS LA VILLE IMPÉRIALE.

souffler comme hier, âpre et glacial, et c’est l’hiver du Nord, succédant sans transition à quelques heures d’un temps radieux du Midi.

J’ai rendez-vous par là, dans le bois, avec les membres de la légation de France, pour pénétrer avec eux dans cette sépulcrale « Ville violette », qui est le centre, le cœur et le mystère de la Chine, le véritable repaire des Fils du Ciel, la citadelle énorme et sardanapalesque, auprès de quoi tous ces petits palais modernes, que nous habitons, en pleine « Ville impériale », ne semblent être que jouets d’enfant.

Même depuis la déroute, n’entre pas qui veut dans la « Ville violette » aux grandes toitures d’émail jaune. Derrière les doubles remparts, des mandarins, des eunuques habitent encore ce lieu d’oppression et de magnificence ; on dit qu’il y est resté aussi des femmes, des princesses cachées, des trésors. Et les deux portes en sont défendues par des consignes sévères, celle du Nord sous la garde des Japonais, et celle du Sud sous la garde des Américains.