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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

Le « Pont de Marbre », tout blanc et solitaire, nous mène sur l’autre rive du lac, très rétréci en cet endroit, et c’est là que je dois trouver ce « palais du Nord » où sera ma résidence. Je n’aperçois d’abord que des enceintes s’enfermant les unes les autres, de grands portiques brisés, des ruines, encore des ruines et des décombres. Et, sur ces choses, une lumière morte tombe d’un ciel d’hiver, à travers l’opacité des nuages pleins de neige.

Au milieu d’un mur gris, une brèche où un chasseur d’Afrique monte la faction ; d’un côté, il y a un chien mort, de l’autre un amas de loques et de détritus répandant une odeur de cadavre. Et c’est, paraît-il, l’entrée de mon palais.

Nous sommes noirs de poussière, saupoudrés de neige, nos dents claquent de froid, quand nous descendons enfin de nos charrettes, dans une cour encombrée de débris, — où mon camarade l’aide de camp, le capitaine C…, vient à ma rencontre. Et vraiment on se demanderait, à de tels abords, si le palais promis n’était pas chimérique.