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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

des choses qui ne pouvaient pas être vues, mais des choses dont la renommée pourtant avait traversé les infranchissables murs. Ils évoquaient pour moi des images de lumière et d’ardente couleur, et ils me surprennent, prononcés ici dans ce morne désert, sous ce vent glacé.

Le « Lac des Lotus ! »… Je me représentais, comme les poètes chinois l’avaient chanté, une limpidité exquise, avec de grands calices ouverts à profusion sur l’eau, une sorte de plaine aquatique garnie de fleurs roses, une étendue toute rose. Et c’est ça ! C’est cette vase et ce triste marais, que recouvrent des feuilles mortes, roussies par les gelées ! Il est du reste infiniment plus grand que je ne pensais, ce lac creusé de main d’homme, et il s’en va là-bas, là-bas, vers de nostalgiques rivages, où d’antiques pagodes apparaissent parmi de vieux arbres, sous le ciel gris.

Le « Pont de Marbre ! »… Oui, ce long arceau blanc supporté par une série de piliers blancs, cette courbure gracieusement excessive,