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VERS PÉKIN.

murs autour de nous sont tellement percés de balles que l’on dirait presque un amusement, une gageure : ils ressemblent à des cribles. Là-bas, sur notre droite, ce tumulus de décombres, c’est la légation proprement dite, anéantie par l’explosion d’une mine chinoise. Et à notre gauche il y a la maison du chancelier, où s’étaient réfugiés pendant le siège les braves défenseurs du lieu, parce qu’elle semblait moins exposée ; c’est là qu’on m’a offert de me recueillir ; elle n’est pas détruite, mais tout y est sens dessus dessous, bien entendu, comme un lendemain de bataille ; et, dans la chambre où je coucherai, les plâtriers travaillent encore à refaire les murs, qui ne seront finis que ce soir.

Maintenant on me conduit, en pèlerinage d’arrivée, dans le jardin où dorment, ensevelis à la hâte, sous des grêles de balles, ceux de nos matelots qui tombèrent à ce champ d’honneur. Point de verdures ici, ni de plantes fleuries ; un sol grisâtre, piétiné par les combattants, émietté par la sécheresse et le