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c’est mon nouvel ami, le jeune cheik de Pétra, que Mohammed-Jahl a délégué pour nous conduire en Palestine.

Il n’a rien de son père, ce cheik Hassan : plus petit, plus mince, extrêmement svelte, la taille prise dans une ceinture de cuir qui serre beaucoup ; de vingt à vingt-cinq ans, très bronzé, un visage et des traits en miniature qu’encadre une légère barbe noire ; laid, irrégulier, mais avec une certaine grâce quand même, un certain charme presque féminin ; l’air aussi timide et doux que son père est d’aspect terrible ; détrousseur pourtant comme ses ancêtres, et assassin à l’occasion. Il a de jolies armes et de jolies amulettes ; il porte, comme tous les gens de sa tribu, de longues manches tailladées en pointe, qui traînent à terre lorsqu’il marche et qui flottent au vent quand il est en selle. Il monte un dromadaire dans le genre du mien, à hautes pattes d’oiseau de marais ; il le manœuvre avec une affectation visible et cependant gracieuse. À l’appel de la bride de laine noire, la bête effilée se cambre, contourne étrangement son long cou serpentin ; elle se démène et s’empêtre, sorte de grande autruche à quatre jambes, dans la profusion des franges et des glands noirs qui pendent de ses oreilles, qui descendent de ses flancs jusqu’à ses pieds plats. Et lui,