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Au déclin de la chaleur et du soleil, je m’en vais mélancoliquement vers le rivage.

Elle est, comme hier au soir, exquise et désolée, la plage du désert.

Une lumière d’Éden, une lumière d’enchantement et de féerie rayonne partout sur le gigantesque amphithéâtre de granit rose, où vient mourir la mer de lapis, la mer abandonnée et vide éternellement. Le rideau des magnifiques palmiers verts s’agite au souffle du kamsin ; les petits murs de terre battue, piqués d’ossements blanchis, tibias ou mâchoires, s’émiettent de chaleur et de sécheresse. Sur le sable, il y a des rameaux de corail, un semis de coquilles rares. Et, naturellement, pas une barque en vue, pas un être humain. Au milieu de cette splendeur d’apothéose, rien qu’une fétide carcasse de chameau, qui gît le ventre vidé, montrant ses vertèbres, dans une pose contournée, avec un geste immobilisé de pattes en l’air… Toujours le silence, toujours la paix de la mort, et toujours l’oppression des immenses déserts d’alentour…

À l’heure du Moghreb, le grand cheik n’est pas