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XXVI

… Je ne puis exprimer l’effet étrange que me produisait Rarahu lorsqu’elle me parlait anglais. Elle avait conscience de cette impression, et n’employait ce langage que lorsqu’elle était sûre de ce qu’elle allait dire, et désirait que j’en fusse particulièrement frappé. Sa voix avait alors une douceur indéfinissable, un bizarre charme de pénétration et de tristesse ; il y avait des mots, des phrases qu’elle prononçait bien ; — et alors il semblait que ce fût une jeune fille de ma race et de mon sang ; il semblait que tout à coup cela nous rapprochât l’un de l’autre, d’une manière mystérieuse et inattendue……


Elle voyait maintenant qu’il ne fallait plus songer à me garder auprès d’elle, que ce projet d’autrefois était abandonné comme un rêve d’enfant, que tout cela était bien impossible et bien fini pour jamais. Nos jours étaient comptés. — Tout au plus parlais-je de revenir, et encore, elle n’y croyait pas. En mon absence, je ne sais ce qu’avait fait la pauvre petite ; on ne lui avait