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XXXV

Tiahoui, qui était en visite à Papeete, était descendue chez nous avec deux autres jeunes femmes de ses fetii de Papéuriri.

Elle me prit à part un soir avec l’air grave qui précède les entretiens solennels, et nous allâmes nous asseoir dans le jardin sous les lauriers roses.

Tiahoui était une petite femme sage, plus sérieuse que ne le sont d’ordinaire les Tahitiennes ; dans son district éloigné, elle avait suivi avec admiration les instructions d’un missionnaire indigène ; elle avait la foi ardente d’une néophyte. Dans le cœur de Rarahu, où elle savait lire comme dans un livre ouvert, elle avait vu d’étranges choses :

— « Loti, dit-elle, Rarahu se perd à Papeete. Quand tu seras parti, que va-t-elle devenir ? »

En effet, l’avenir de Rarahu tourmentait mon cœur ; avec la différence si complète de nos natures, je ne savais qu’imparfaitement saisir tout ce qu’il y avait en elle de contradictions et d’é-