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sous les tropiques connaissent ce bien-être énervant du sommeil de midi. — Sous la vérandah de notre demeure, nous tendions des hamacs d’aloës, et là nous passions de longues heures à rêver ou à dormir, au bruit assoupissant des cigales.

Dans l’après-midi, c’était généralement l’amie Téourahi que l’on voyait arriver, pour jouer aux cartes avec Rarahu. — Rarahu, qui s’était fait initier aux mystères de l’écarté, aimait passionnément, comme toutes les Tahitiennes, ce jeu importé d’Europe ; et les deux jeunes femmes, assises l’une devant l’autre sur une natte, passaient des heures, attentives et sérieuses, absolument captivées par les trente-deux petites figures peintes qui glissaient entre leurs doigts.

Nous avions aussi la pêche au corail sur le récif. — Rarahu m’accompagnait souvent en pirogue dans ces excursions, où nous fouillions l’eau tiède et bleue, à la recherche de madrépores rares ou de porcelaines. — Il y avait toujours dans notre Jardin inculte, sous les broussailles d’orangers et de gardénias, des coquilles qui séchaient, des coraux qui blanchissaient au soleil, mêlant leur ramure compliquée aux herbes et aux pervenches roses……