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RÊVE

d’ordinaire dans les habitations des planteurs.

Une autre ombre de femme qui nous attendait là, vêtue d’une robe créole, — une femme âgée que je reconnus aussi tout de suite et qui lui ressemblait, sa mère sans doute, — se leva à notre approche et nous sortîmes tous les trois, sans nous être concertés, comme obéissant à une habitude… Mon Dieu, que de mots et que de longues phrases pour expliquer lourdement tout cela qui se passait sans durée et sans bruit, entre personnages diaphanes comme des reflets, se mouvant sans vie dans une obscurité toujours croissante, plus décolorée et plus trouble que celle de la nuit.

Nous sortîmes tous trois, au crépuscule, dans une petite rue triste, triste, bordée de maisonnettes coloniales basses sous de grands arbres ; au bout, la mer, vaguement devinée ; une impression de dépaysement,