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chines ; déjà ils se plaignent de ne pouvoir plus vivre. Et bientôt on les enverra, par milliers et centaines de milliers, joncher de leurs cadavres ces plaines de Mandchourie, où doit se dérouler la guerre inévitable et prochaine. Pauvres petits paysans japonais !…

Donc, nous avons quitté aujourd’hui dans la matinée ce délicieux lac du vieux temps qu’est la mer Intérieure. Et ce soir, à nuit close, nous sommes revenus mouiller dans la baie aux mille lumières, devant la ville de madame Prune, — autant dire chez nous, car à la longue, il n’y a pas à dire, nous nous sentons presque des gens de Nagasaki.

Une bonne nouvelle nous attendait du reste à l’arrivée, une dépêche annonçant que le Redoutable rentrera en France au mois de janvier prochain, après ses vingt mois de campagne. Et tout le monde, officiers et matelots, s’est endormi dans la joie.