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tout changer dans cet Empire du Soleil-Levant à jadis immuable, et déjà ils ont l’air d’observer attentivement la vie, avec leurs prunelles de jais noir, mystérieuses entre leurs paupières bridées. Surtout ils se protègent et s’entr’aident les uns les autres, d’une façon gentille et touchante ; il n’en est pas de si petit auquel ne soit confié un frère, moindre encore et plus poupée que lui. Pourtant on en voit aussi qui s’amusent ; gravement ils tiennent la ficelle de quelqu’un de ces cerfs-volants qui, à l’heure des chauves-souris, se mettent de tous côtés à planer dans le ciel, ayant forme de chauve-souris eux-mêmes, ou de phalène ou de chimère.

Il ne fait plus froid, tout s’égaye, tout s’éclaire… Et la grâce des mousmés, que j’avais à peine comprise, il y a quinze ans, c’est aujourd’hui, dirait-on, qu’elle m’est révélée…

Une fois de plus, après tant d’autres fois, on se laisse prendre à cette éternelle duperie de la nature, qui n’a pour but que de préparer les feuilles mortes et les dépérissements jaunes