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gasaki où nous finissons notre quatrième mois d’un exil très enjôleur.

Là-haut, chez messieurs les Trépassés, la montagne se tapisse de fleurettes sauvages, pour nous inconnues ; autour des stèles innombrables, le petit monde frileux des fougères déplie partout en confiance ses feuilles nouvelles, d’une teinte pâle et rare. Dans la verte nécropole, plus grande que le quartier des vivants, — que j’avais abandonnée par ces temps de neige, et où je recommence de venir, — ce n’est plus cette tiédeur languide et mourante de l’arrière-automne qui s’harmonisait si bien avec les tombes ; c’est un ensoleillement de renouveau, une envahissante gaîté d’herbes folles, qui ne cadrent plus, qui doivent effaroucher les pauvres défunts en cendre et faire s’évanouir plus vite ce qui restait encore de leurs âmes flottantes. Tandis que les grandes pagodes gardiennes, sous ces rayons trop clairs, se révèlent plus vieilles et plus mornes, leurs boiseries plus vermoulues, leurs monstres plus caducs.

En bas, sur la ville de cèdre et de papier, la lumière est maintenant en continuelle fête ;