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nuages, soit averti qu’on est là, que l’on demande audience. Alentour, les hommes ont arrangé cette nature, déjà presque trop jolie par elle-même, en quelque chose de plus joli encore, de plus compliqué surtout, ajoutant des rocailles aux rochers, créant des petits ruisseaux pour y jeter des ponts. Les herbes très délicates, les mousses, toute l’exquise flore sauvage d’ici, apportent leur charme intime à ces arrangements qui ne seraient guère que prétentieux chez nous. Par ailleurs, ce temple, ces objets symboliques, déroutants de simplicité bizarre, que l’on aperçoit au fond sur l’autel, imprègnent le jardin désert d’on ne sait quelle transcendante et indicible japonerie. Et, au-dessus de tout cela, se dresse la montagne avec ses fourrés de verdure.

Juste en face du sanctuaire, une maison-de-thé, gentille et vieillotte, se dissimule à moitié dans les arbres ; on y accède par un arceau en granit feutré de lichen, qui enjambe un torrent, et près duquel, dans une vaste cage, deux grues blanches à huppe rouge, de la grande espèce, se tiennent immobiles : pensionnaires