Page:Loti - La Mort de notre chère France en Orient, 1920.djvu/95

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

perfidie parce que, lâchés par nous, ils se sont défendus comme ils pouvaient contre l’anéantissement dont ils se sentaient menacés pour demain. Ils ont du reste assez souvent exprimé leur regret profond d’avoir été obligés de se battre contre nous, et surtout, par leur façon fraternelle de traiter nos blessés et nos prisonniers, ils ont assez souvent prouvé combien, dans le fond, ils restaient nos amis !

En fait de trahisons, pendant la grande guerre, j’ai vu d’abord, et bien vu, celle de la Russie, qui restera une des plus colossales de l’histoire humaine. Ensuite, les cinq ou six petites trahisons successives, chroniques, pourrais-je dire, de la Bulgarie, tirant chaque fois dans le dos de ses alliés sans crier gare. Enfin j’ai vu les trahisons de la Grèce, celle d’Athènes, la plus odieuse de toutes, le massacre de nos matelots sans armes, et puis toutes celles de Salonique, dont la série dura pendant tout notre séjour, d’ailleurs avec accompagnement ininterrompu, le long des quais, des vols les plus éhontés de notre matériel, de nos munitions, de nos vivres.

Oh ! à côté de ces procédés, combien est reposante la belle et sûre honnêteté turque ! Dans cette Salonique devenue grecque, chaque mois il fallait fréter un bateau pour déporter des