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lumineux, comme si l’on était au bord de la Méditerranée ; tout est éclairé en splendeur, et jamais mois de juin n’a commencé dans un rayonnement plus pur.

J’ai dormi cette fois à Dunkerque, — bien entendu, dormi sur le qui-vive, — à l’hôtel des Arcades ; mes fenêtres aux vitres cassées donnent sur la grande place où trône la statue de Jean Bart, et toute la nuit, au-dessus de ma tête, ces grosses phalènes bourdonnantes que sont nos avions de veille ont dansé leurs rondes dans le ciel plein d’étoiles. À présent une fraîche lueur un peu rose envahit lentement ma chambre ; l’heure de la mort est donc vraisemblablement passée ; l’ennemi nous aura sans doute épargnés au moins jusqu’à demain. Il doit être quelque chose comme quatre heures ; l’aube d’un dimanche de juin sans nuages se lève en silence sur la ville, qui va enfin reposer quelques instants dans une délicieuse paix, et les grandes phalènes nocturnes, leur garde finie, s’éloignent, redescendent vers leurs dortoirs ; dans l’air léger qui s’éclaire, on ne les entend plus qu’à peine.

Mais tout à coup voici les sonorités toutes