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que des tas de pierres éboulées qui en conservent vaguement la silhouette ; aussi tous les noms sont-ils tristes à lire, et presque pourrait-on comparer ces inscriptions aux épitaphes d’un cimetière immense. En outre, pour rendre plus tragiques les carrefours, certain avertissement sinistre s’y répète d’une façon obsédante, et c’est toujours sur de pareils panneaux de bois blanc, que des poteaux soutiennent en l’air, le plus en vue possible : « Défiez-vous des gaz, tenez vos masques prêts. » En effet, il sévit beaucoup, dans ces parages, cet ignoble procédé de destruction qu’ils ont osé introduire dans leur guerre, et, à partir d’ici, tous nos camions bondés de soldats, qui, nuit et jour, courent follement sur ces « voies douloureuses », risquent de pénétrer soudain dans les nuages de ces fumées qui seraient mortelles, s’ils tardaient quelques secondes de trop à s’envelopper le visage.

De tant et tant de ruines, celles qui le plus vous serrent le cœur, — plus encore que celles des maisons, des vieilles maisons familiales, des humbles maisonnettes avec jardinets, — ce sont les ruines des églises ; on les