Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/65

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

m’explique mon djin, lorsque ces dieux sortent, suivis de la longue procession de leurs prêtres. Ailleurs, ce sont des bannières, des cartouches et des hampes d’or, tous les accessoires des grands défilés rituels, qui s’exécutent chaque année d’après une étiquette millénaire et immuable.

La foule devient plus pressée, et nous voici devant le grand temple. Sa haute toiture compliquée se dresse en face de nous en montagne grise, dépassant les branches des vieux arbres, masquant tout le fond du tableau. On monte au sanctuaire par d’immenses gradins qui sont absolument encombrés de Nippons et de Nippones. Ces gens sont pieds nus, ou marchent sur leurs chaussettes blanches à orteil séparé ; aussi y a-t-il en bas, sous la surveillance d’un bonze, une incroyable quantité de socques de bois, de sandales de paille ; comment tout ce monde s’y reconnaîtra-t-il au départ ? Cela me semble un mystère. Je me déchausse aussi, ne craignant aucune confusion pour mes bottines, qui sont là uniques dans leur genre, et je monte, en compagnie de mon ami Kalakawa, poussant un peu, pour arriver plus vite, les groupes nonchalants et stationnaires. Beaucoup de figures jaunes, à petits yeux en amande, se retournent pour me regarder avec une curiosité bienveillante ; un léger murmure d’étonnement parmi les mousmés, même quelques révérences à mon adresse, qui