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Ils habitent, ces amis, dans des maisons japonaises. Et ma journée se passe, chez l’un ou chez l’autre, à causer et à attendre, en séchant devant leurs réchauds de bronze ma tenue de gala toute mouillée. Elles sont mortelles, ces habitations japonaises, par une pluie de novembre : bien basses de plafond ; bien isolées de la rue par de bizarres jardinets sans fleurs, tout en petites pelouses et en petits rochers ; bien mesquines et toujours divisées, par des panneaux de papier à glissières et à trucs, en une série de pièces lilliputiennes, de plus en plus sombres à mesure qu’on s’éloigne de la véranda par où vient la lumière. Et une si triste lumière ! Un demi-jour terne, blafard, glacial, filtrant à travers ces carreaux de papier qui font l’office de vitres. Naturellement, on ne distingue rien du dehors à travers ces carreaux-là, — mais on l’aime encore mieux, je crois, que de voir tomber toute cette eau sur les petits tertres ruisselants, sur les ravins en miniature, les petits ponts de poupée, les petits arbres, toutes les mièvreries du jardin.

En vérité, ces nattes blanches sur le plancher vous font geler, — et aussi ce bois blanc partout, ces minces murailles de papier blanc, cette absolue nudité du gîte. Alors on s’assied bien près, bien près du grand réchaud lourd, qui pose sur un trépied de laque et dont les anses représentent des monstres : là dedans brûle un charbon