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la nuit tombera certainement quand nous arriverons.


L’Uyeno. — Un très grand parc ; des avenues larges, bien sablées, que bordent de vieux arbres magnifiques ou des touffes de bambous.

Je m’arrête d’abord sur une hauteur, en un point d’où l’on domine le lac des Lotus — qui reflète ce soir, comme un miroir légèrement terni, tout l’or du couchant. Yeddo est derrière ses eaux tranquilles ; Yeddo est au delà, à demi perdu dans le brouillard roux des soirs d’automne : une myriade, un infini de petits toits grisâtres tous pareils ; — les derniers, presque effacés à l’horizon trouble, donnant bien l’impression que ce n’est pas tout, qu’il y en a encore et encore, dans les lointains qu’on ne peut voir. En regardant bien, au milieu de l’uniformité des maisonnettes basses, on distingue quelques toits un peu grands, retroussés aux angles : les pagodes. Si elles n’étaient pas là, on imaginerait n’importe quelle immense ville aussi bien que la capitale du Japon. En vérité, il faut l’éloignement et les éclairages singuliers pour faire d’Yeddo quelque chose qui charme ; — en ce moment, par exemple, j’avoue que c’est exquis à regarder.

Cela se dessine confusément dans des teintes rares ; cela a l’air de ne pas exister, d’être un mirage. Il semble que de longues bandes d’ouates