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— Mais tout ce qui touche à cette histoire est pour les Japonais tellement saint et vénérable, qu’on n’en saurait parler avec des formes trop respectueuses.

Devant chacune de ces pierres, il y a de beaux bouquets, des fleurs toutes fraîches, évidemment cueillies ce matin même ; il y a aussi des petits tas de choses grisâtres, des restes de baguettes d’encens, dont le vent promène les cendres encore odorantes sur l’herbe triste d’alentour. Et c’est comme cela, sans relâche, depuis l’an 1702, et ce sera sans doute ainsi pendant bien des années encore, car le bouleversement moderne, qui, au Japon, emporte tant de choses, semble n’avoir pas de prise sur le culte du peuple pour les morts.

La fille d’un des Samouraïs, qui était prêtresse, a obtenu d’être mise là elle aussi, à côté de son père, et cela fait, en dehors de l’alignement, une tombe de plus. Elle a du reste, ses fleurs comme les autres, cette mousmé, ses fleurs et son encens, sa part de souvenir et de vénération.

Une étonnante quantité de petites bandes de papier, blanches ou rouges, portant des noms écrits, sont collées sur les pierres tombales, ou jetées dans l’herbe à leurs pieds : ce sont les noms des pèlerins, qui journellement viennent, de tous les coins de l’empire, rendre hommage aux gentilshommes fidèles. Dans le nombre se trouvent même des vraies cartes de visite tout à