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par des colonnes d’or. Une vague lumière frisante, éclairant comme par en dessous, entrant par des fenêtres très grillées, très basses ; des fonds ténébreux, indécis, pleins de miroitements de choses précieuses.

Des ors jaunes, des ors rouges, des ors verts ; des ors vifs ou atténués, discrets ou étincelants ; çà et là, aux frises, aux chapiteaux exquis des colonnes, un peu de vermillon, un peu de vert émeraude ; très peu, rien qu’un mince filet de couleur, juste assez pour relever quelque aile d’oiseau, quelque pétale de lotus, de pivoine ou de rose. Aucune surcharge malgré tant de richesse ; un tel goût d’arrangement sous des milliers de formes diverses, un tel accord dans des dessins d’une complication extrême, que l’ensemble paraît simple et reposé.

Pas de figures humaines, pas d’idoles nulle part dans ce sanctuaire du shintoïsme. Sur les autels, rien que des grands vases d’or remplis de fleurs naturelles en gerbes ou de gigantesques fleurs d’or.

Pas d’idoles, mais des nuées de bêtes, ailées ou rampantes, connues ou chimériques, se poursuivant aux murailles, s’envolant aux frises et aux voûtes, dans toutes les attitudes de la fureur et de la lutte, de l’épouvante et de la fuite. Ici, un vol de cigognes détalant à tire-d’aile le long d’une corniche d’or ; ailleurs des papillons avec des tor-