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nôtres, évidemment ; foules soigneuses, polies, s’avançant avec des révérences, sur des sandales légères, au frou-frou des soies, au bruit des éventails.

Une telle conservation est déjà, à elle seule, un de ces prodiges japonais qui seraient bien impossibles chez nous, avec nos cohues de gens grossiers et casseurs…


Nous traversons cette cour vide. Le soleil matinal y pénètre ; deux de ces murailles d’or sont dans l’ombre, les deux autres brillent ; les têtes des grands cèdres d’alentour les dépassent ; on sent qu’on est au milieu des bois, et on entend bruire les cascades.

À la porte du palais de l’Éclat d’Orient, nous nous arrêtons sur de grandes marches de bronze pour nous déchausser comme c’est l’usage.

De l’or partout, de l’or resplendissant. Une ornementation indescriptible a été choisie pour ce seuil : sur les montants énormes, sont des espèces de nuages moirés, d’ondulations marines, au milieu desquels apparaissent çà et là des tentacules de méduses, des extrémités de pattes griffues, des pinces de crabes, des bouts de longues chenilles plates et squameuses ; toutes sortes de fragments horribles, imités, en gigantesque, avec une vérité saisissante et donnant à penser que les bêtes auxquelles ils appartiennent sont là, à demi cachées