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terrain. Le principal ornement du lieu est une tour à cinq étages qui dépasse la cime des plus grands arbres et s’en va baigner dans le soleil sa pointe dorée : elle fut, dit l’histoire, offerte vers 1650 à l’âme de l’empereur mort, par le prince Sakaï-Wakasa-no-Kami. Le nom de tour convient mal à cette extravagante superposition de cinq petites pagodes semblables, ayant chacune son toit courbe qui déborde outre mesure, tout hérissé de gargouilles, de cornes et de griffes ; la teinte générale du monument est le rouge sombre, le rouge sang rehaussé d’or ; mais, de près, on distingue une fine ornementation polychrome qui court du haut en bas ; de près, on s’aperçoit que les murailles de ces cinq étages sont de vrais musées de peinture et de sculpture ; dans l’épaisseur du bois fouillé à jour, se découpe tout un monde de dieux, de bêtes, de chimères, de fleurs ; une dentelle de petits êtres de toutes formes, figés là dans des attitudes vivantes.

Un grand portique vient ensuite : tout de bronze celui-ci, et d’une forme calme, reposante, orné discrètement de quelques rosaces d’or ; puis des marches de granit, et on arrive à la seconde enceinte, remplie de choses encore plus rares. Toujours l’ombre des cèdres ; ici comme dans la première cour, ils poussent en rangs serrés, les arbres géants ; leurs troncs lisses et droits, ayant çà et là des plaques de mousse, se dressent comme