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chimères d’or. Tout cela monte sous l’ombre mystérieuse des arbres avec une apparence de désordre ; on dirait quelque ville, d’une splendeur inouïe et d’une architecture très rare, qui serait ensevelie pêle-mêle sous cette verdure.

Un premier temple, auquel nous nous arrêtons. Il est dans un lieu un peu dégagé, dans une sorte de clairière. On y monte par un jardin en terrasses superposées ; jardin avec rocailles, pièces d’eau et arbres nains aux feuillages violacés, jaunes ou rougeâtres.

Le temple, très vaste, est tout rouge, d’un rouge de sang ; une énorme toiture, noir et or, retroussée aux angles, semble l’écraser de son poids. Il en sort une musique religieuse, douce et lente, interrompue de temps en temps par un effroyable coup sourd.

Il est ouvert en grand, ouvert sur toute sa façade à colonnes ; mais l’intérieur en est masqué par un velum blanc, immense. Le velum est en soie, orné simplement, dans toute son étendue blanche, de trois ou quatre larges rosaces héraldiques noires dont le dessin très simple a je ne sais quoi de distingué et d’exquis, et, derrière cette première tenture, à demi soulevée, des stores légers en bambou sont abaissés jusqu’à terre.

Nous montons plusieurs marches de granit, et mon guide, pour me faire entrer, écarte un pan du voile ; le sanctuaire apparaît.