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demie !) — Oh ! il doit être plus que cela même, car il fait déjà bien jour.

Puis les voici qui ouvrent bruyamment tous les panneaux de bois du dehors, et, après, comme si ça ne suffisait pas, tous les panneaux intérieurs en papier mince, me livrant ainsi à l’air glacé du matin, à l’éblouissante lumière du soleil qui se lève. En un tour de main c’est fait, ma chambre est démontée, n’a plus que deux faces sur quatre ; je suis en plein vent.

Au Japon, le lever est impitoyable, même en hiver, et c’est en somme une façon comme une autre d’abréger un moment toujours ennuyeux.

Pour moi surtout, qui suis arrivé hier dans l’obscurité épaisse, comme si on m’avait amené les yeux bandés, c’est une surprise presque charmante que de tout voir apparaître ainsi, de cette manière brusque et imprévue. Il semble que ce rideau de la nuit se soit levé d’un seul coup, comme un rideau de théâtre, sur un décor préparé derrière et baigné dans la plus fraîche et la plus pure lumière d’or.

Au premier plan, le jardinet de la maison, avec ses rocailles, ses arbustes nains, ses pièces d’eau, ses pagodes en miniature. Derrière, un fond très haut, escaladant le ciel, un fond composé de montagnes aux dentelures bizarres, de forêts nuancées par l’automne. Et les premiers rayons du soleil, se promenant gaiement sur les cimes avec un bel éclat de rose.