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Voici d’abord les deux ou trois couvertures ouatées qui se superposent par terre pour former matelas ; voici les oreillers en peluche noire, et enfin la couverture supérieure également ouatée, ayant deux trous, garnis de manches pagodes, par lesquelles on passe les mains.

Les mousmés assistent à mon petit coucher, s’informent de l’heure à laquelle il faudra m’éveiller demain, baissent la lampe, éloignent les fleurs, s’attardent à mille détails, plus du tout endormies, mais lentes à se retirer, comme nourrissant un secret espoir d’être un peu retenues.

Cependant les voilà parties, un panneau de papier se referme sur elles, et je reste seul.

Elles rôdent longtemps encore à l’extérieur de la véranda, en promenant des lampes. Et, sur les châssis dé papier mince, je vois passer et repasser en ombres chinoises leurs belles coques de cheveux piquées d’épingles, et leurs petits bouts de nez camus. Tout cela pour me faire bien comprendre qu’elles sont encore sous les armes, au cas où j’aurais besoin de les rappeler pour quelque service plus spécial. Mais non, j’ai vraiment tout ce qu’il me faut, merci ; et je ne désire plus rien, que dormir.

À la fin, le silence se fait dehors, l’obscurité aussi : les mousmés se sont lassées. La maison-de-thé, que mon arrivée avait tenue en éveil à une heure indue, s’est endormie profondément, comme