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beau matin printanier ! Par cette soirée de novembre, il me semble être roulé dans un souterrain sans issue, n’aboutissant nulle part, et j’ai des envies de revenir en arrière, de m’échouer dans n’importe quel village, comme ils le voulaient tout à l’heure, dans n’importe quelle auberge pour me chauffer, m’étendre, voir des mousmés rieuses, manger du riz, dormir…

Et puis j’aimerais mieux être à pied, courir moi aussi derrière mon char ; j’aurais moins de cahots et moins froid. Mais cela blesserait mes hommes dans leur amour-propre de coureurs ; dès que je mets pied à terre, ils me prient de me rasseoir.

Dix heures et demie. Comme des chevaux sentant la remise, ils vont plus vite. Et enfin, enfin, des feux apparaissent là-bas, là-bas, des lanternes de couleur : Nikko ! Nikko, au bout du tunnel des cèdres !

Nikko ! Oh ! jamais petit Poucet perdu dans la forêt n’accueillit avec plus de joie la lueur de la maison de l’ogre, que nous, cette nuit, les feux de cette ville inconnue.