Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/134

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mais, en regardant mieux, on reconnaît là une bien extraordinaire toilette, d’un raffinement souverain. La robe est à grande queue, à grandes manches pagodes, à haut col droit, — un peu évasé pour encadrer la tête, à la manière des fraises Médicis. Elle est faite de sept doubles d’une fine mousseline de soie, superposés, tous de nuances différentes, et laissés libres d’ondoyer séparément dans la longueur de la traîne. L’étoffe de dessus, qui jadis était blanche et que le temps a rendue d’une couleur de vieil ivoire jauni, est semée d’oiseaux envolés (grandeur de moineau à tête de dragon), très espacés dans leur vol fantastique, les uns verts, les autres bleus, les autres jaunes ou violets. La deuxième étoffe est jaune, la troisième bleue, la quatrième violette, la cinquième vieil or, la sixième verte, — toutes parsemées d’animaux étranges et différents qui volent à tire-d’aile. La dernière, enfin, celle de dessous, celle qui touchait et enveloppait le corps d’ambre de l’impératrice, est violette, semée de blasons impériaux — qui sont des enroulements de chimères. Ces broderies ont été faites avec un art si léger, qu’elles restent transparentes comme la gaze qui les porte ; le temps en a effacé les teintes premières, qui devaient être déjà atténuées, très discrètes ; aussi l’ensemble est-il vaporeux, changeant, incolore, grisâtre comme une fumée.

Pauvres belles robes ! Par le bas, elles sont